Cartigny

A la recherche du Passé de Pœuilly et de ses environs : des passionnés ont remonté l'Histoire...


            Église de CARTIGNY dédiée à Sainte Radegonde
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Documentation :

(1) Document préparé par l’ARHL, reprenant les éléments présentés à l’occasion de la visite
de l’église le 14-05-2022 (visite assurée par Pierre LEROY) dans le cadre du Printemps des Arts
Déco organisé par le Pays Santerre Haute Somme, labellisé « Pays d’Art et d’Histoire » en
2021.
(2) Notes et commentaires de l’abbé STUDZINSKI, curé de Cartigny dans les années 1960 – 1970 ;
dépositaires du dossier original : Mr et Mme DAMAY.
(3) Cartes postales anciennes issues de la collection de Mr et Mme DAMAY
(4) Photos JP PREVOT
(5) C. Frémaux – La Reconstruction dans l’Est de la Somme.
(6) Le Livret d’expo de 2014 - Pascale TOUZET

Éléments historiques :

  Nous sommes ici dans une église de la Reconstruction. L’ancienne église a été détruite en Mars 1917 lors du repli des régiments allemands vers la ligne Hindenburg, située, pour notre secteur, au niveau de Saint-Quentin.

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Cartigny : ruines de l’égliseCartigny : l’église provisoire et les ruines de l’ancienne église


L’ancienne église avait été construite en 1198.

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L’aspect de l’ancienne église peut être découvert à partir d’une Aquarelle peinte vers 1875, d’après nature par le peintre Macqueron (Bibliothèque Municipale d’Abbeville, collection Macqueron, cote Roi.08) ; ainsi qu’une carte postale colorisée d’avant la destruction en 1917 et qui la représente sous le même angle.

   La cuvette des Fonts baptismaux datant du XIIème siècle témoigne de l’ancienneté de l’église d’origine : classée depuis 1907, elle a résisté à la destruction ; cependant le fût central et les 4 colonnes qui en constituent le support datent de la reconstruction.

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                     Eglise en cours de reconstruction 1924 – 1926


L’église a été reconstruite quasiment à l’identique entre 1924 et 1927, « sur le même emplacement, dans le même style et le même matériau. »(Moellons de grès régulièrement appareillés, chevet en brique aux chaînages de pierre et  couverture en ardoise (5)
Une différence au niveau du clocher : avant sa destruction en 1917, Il était moins élancé. On y ajouta un étage supplémentaire pour y installer le mécanisme d’une horloge.
D’autre part, technique nouvelle, les architectes ont choisi l’utilisation du béton pour la charpente (5).


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La reconstruction s’est faite pendant le pastorat de l’abbé Etienne SERPETTE,
posant ici devant le portail en 1925.

Description de l’église reconstruite :

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   A la reconstruction, l’édifice conserve son plan d’avant-guerre. En regardant la photo de l’église ancienne, on retrouve la même disposition des lieux, mais en moins chargé au niveau des murs et de la voûte.
En effet, l’église actuelle est très sobre et d’une grande simplicité.
Reprenons la description qu’en faisait l’abbé Studzinski, ancien curé de
Cartigny :
« La nef centrale est dépourvue de tout ornement, et comprend 4 travées
éclairées de petites fenêtres en plein cintre, sous lesquelles s’ouvrent des
arcades en tiers-point, arcades à double bandeau retombant sur des piliers
énormes, dépourvus de socle et sans impostes.
L’arc triomphal qui donne sur le choeur appartient au même style avec voûte plus basse longitudinale en tiers points.

L’éclairage du choeur à 3 pans aveugles provient de six fenêtres en berceau » avec des vitraux symboliques que nous détaillerons ci-après.
« La voûte, les pilastres, les arcs et les murs sont recouvert d’un enduit imitant la pierre appareillée grâce à des joints incrustés. » (5)

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« Le chœur, par rapport à la nef centrale dévie sensiblement du côté droit. »

La déviation de l’axe du chœur par rapport à celui de la nef :

  Ceci n’est pas propre à l’église de Cartigny ; ça peut s’observer dans nombre d’églises, de basiliques ou de cathédrales et il n’y a pas d’explications qui fassent consensus. Viollet-le-Duc note que cette « déviation de l’axe » se retrouve principalement dans les églises du XIème et XIIème siècle et considère qu’il s’agit sans doute d’erreurs de la part des architectes de l’époque.
D’autres y voient un sens symbolique se rapportant à la mort du Christ qui, quand il rendit son dernier souffle, laissa sa tête retomber vers la droite ; le léger décalage du choeur par rapport à l’axe de la nef viendrait rappeler ainsi la mort du Christ… Donc, il y a une déviation de l’axe, mais sans qu’il y ait une explication reconnue et consensuelle.
Pour Cartigny, on sait que le choeur a été reconstruit au même emplacement que celui de l’église ancienne… reprenant donc également ce même décalage… par des architectes modernes ; nous pensons, sans doute, plus à la symbolique qu’à la reproduction d’une erreur des anciens…

L’église de Cartigny est l’une des premières églises du secteur à être
reconstruite. La Commune demande que l’église soit rétablie « dans son état primitif ». Le devis descriptif date d’avril 1923. Il est signé par deux architectes de Péronne, Louis FOUGERON et Clément COCQUEMPOT, qui ouvrent le chantier en 1924. Les travaux sont suivis par Louis FOUGERON qui était présent à la bénédiction de l’église par Mgr LECOMTE, évêque d’Amiens le 31 Juillet 1927.

La réalisation du mobilier d’église et des aménagements intérieurs est confiée à l’architecte Pierre ANSART et à son fils Gérard ANSART, Décorateur de 21 ans (né en 1903) qui deviendra ensuite architecte. Les maquettes et les cartons sont principalement signés Gérard ANSART. Pour ce qui concerne les vitraux, Céline Frémaux nous indique qu’« il opte pour un fond géométrique sobre (avec des spirales très présentes qui seraient peintes à la main) et un traitement graphique des figures, une stylisation des formes qui permet selon lui d’exprimer le maximum avec le minimum de moyens.» La réalisation des vitraux est confiée au verrier Georges TEMBOURET qui « multiplie les
innovations techniques avec des verres coulés, du verre cathédral et des cives ». (Les Cives sont des pièces de verre circulaires et incolores)

Les vitraux avaient fait polémique lors de leur installation ; les fidèles n’étaient pas familiarisés avec la simplification des lignes. Notons qu’à l’occasion de l’exposition sur Gérard ANSART en 2014, une de ses filles avait évoqué le fait qu’un car avait été affrété de Paris pour amener des artistes voir les vitraux de Cartigny !
Souvenons-nous qu’on était en pleine période de l’Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes qui s’est tenue d’Avril à octobre 1925 à Paris.

La disposition des vitraux de la nef semble bien pensée et équilibrée :


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À gauche, au fond : « Sancta Thérèsia » Sainte Thérèse, (béatifiée le 29 avril 1923 et canonisée le 17 mai 1925. La dévotion à Ste Thérèse est illustrée par la décoration de l’église en 1934, à l’occasion d’une mission durant laquelle la statue fut bénie).

A noter sur le vitrail, les « S » et les « T » à partir des spirales. Dans ses mains, la référence aux « Roses » : « Je veux passer mon Ciel à faire du bien sur la terre. /Après ma mort, je ferai tomber une pluie de roses » … pour
identifier le flot de grâces que Thérèse voulait « faire tomber » sur ceux qui l’invoqueraient (grâces et faits miraculeux).

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À droite, au fond, Saint Eligius - Saint-Eloi de Noyon : Saint-patron notamment des maréchaux-ferrants et des agriculteurs, donc très présent en milieu rural ; mais, à noter qu’il est né en 588, quand Sainte Radegonde est morte en 587… y-a-t-il là une symbolique qui a présidé à ce choix ?

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Après St-Eloi, sur la droite de la nef figure St-Joseph…avec, en main, un outil de menuisier (une équerre, semble-t-il).
À gauche, après la porte d’entrée : « Sancta Maria » la Vierge Marie avec l’enfant Jésus dans les bras, tourné vers elle, avec une vraie tête de bébé.
En face de la Vierge Marie, à droite de la nef, un vitrail endommagé est actuellement obstrué. Il s’agit du vitrail de Sainte Radegonde. Vous pourrez en voir la photo près de la chapelle dédiée à Sainte Radegonde.

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À gauche, au niveau des autels latéraux, on peut lire sur le vitrail : « Christus Rex » le Christ Roi. Des cives (pièces de verre circulaires incolores) constituent la couronne. Il en est de même pour le vitrail de Sainte Radegonde qui porte
une couronne bleue surmontée d’une rangée de cives.
En remontant vers le choeur, le Chemin de croix en mosaïques. Les mosaïques sont insérées directement sur les piliers, sur une face et la face inverse et cela de part et d’autre de la nef. Les stations du Chemin de croix sont ainsi visibles ainsi dès l’entrée dans l’église, et de même quand on en sort. C’est, sans doute, sa singularité.

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Chemins de croix de Louis MAZETIER :
Souvent attribué à Gérard ANSART, il a en fait été dessiné par le cartonnier et maître-verrier vendéen, Louis MAZETIER qui exerçait dans le cadre de l’atelier parisien de Jean GAUDIN, décorateur. Un 1er modèle avait été présenté lors de L’Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes en 1925. Un second modèle ayant été élaboré, celui-ci attira l’attention de plusieurs architectes. L’architecte Pierre ANSART, comme d’autres, en fit la commande. Pour l’église de CARTIGNY, la commande fut passée en janvier 1927. Il en passa commande aussi pour Coullemelle en 1926 et pour Marquivillers en 1929. Séduits, comme lui, par ce chemin de croix en mosaïque, plusieurs architectes en ont commandé un pour telle et telle église, au point que des évêques ou des prêtres se sont inquiétés de cette multiplication de commandes de ces chemins de croix, ne souhaitant pas
que la paroisse voisine ait le même que sa propre paroisse. Aussi de légères modifications ont été proposées. Par exemple, au niveau du coloris de fond, il peut y avoir une différence : gris comme ici ou ocre par exemple comme à Allaines.
. Et, petite distinction possible également : soit un « e » (comme ici à Cartigny ou à Estrées-Mons), soit un « E » (Fresnes-Mazancourt) dans la phrase sous le dessin. Mais un des signes qui authentifie ces chemins de croix comme étant de Louis MAZETIER, c’est que c’est toujours la même phrase, sous une station donnée. La dimension peut être aussi différente, c’est le cas, unique semble-t-il, à Fresnes-Mazancourt. Cette surface plus grande de l’encadrement engendre de possibles modifications supplémentaires pour remplir l’espace, comme, par exemple, un personnage en plus, comparativement aux chemins de croix de Cartigny, Estrées-Mons ou Allaines (une
femme par exemple…ou un officier).
 À Coullemelle (près de Montdidier), la différence se fait dans la présentation des stations groupées par deux et accompagnées d’une frise décorative. Dans d’autres églises, on peut noter une différence au niveau de l’encadrement. Dans la Somme, on peut également voir ce chemin de croix à BOUCHOIR (Terre de Picardie). DOMPIERRE-BECQUINCOURT (près d’Estrées-Deniécourt). Et il y en a d’autres encore : dans l’Oise, dans l’Aisne et ailleurs.
Divers éléments mobiliers en fer forgé dans l’église.
Le confessionnal, au fond, sur la droite, un peu caché, mérite aussi d’être vu pour la représentation en fer forgé qui y figure à mi-hauteur de l’élément central ainsi que pour les spirales en fer forgé qui complètent l’ornementation du confessionnal et qui s’harmonisent avec les spirales des vitraux.
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Le croisillon sud :
Dans cette partie de l’église, lors de la destruction par explosif, les murs sont restés debout.
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La grotte de Lourdes (grotte de Massabielle), érigée vers 1888, s’est trouvée préservée lors de la destruction. Elle est donc antérieure à la 1ère guerre mondiale. (Les apparitions à Lourdes ont eu lieu en 1858 – du 11 février 1858 au
16 juillet 1858 – à la grotte de Massabielle) L’autel moderne s’intègre bien à son environnement plus ancien.

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La fenêtre ogivale, de style flamboyant, datant du XIVème siècle, a été endommagée lors de la destruction de l’église. Elle fut refaite à la reconstruction et garnie d’un vitrail moderne représentant l’Annonciation.
Les paroles écrites sur les phylactères ainsi que les représentations qui figurent sur le vitrail traduisent tout à fait le début de « l’Angélus » :
. L’ange du Seigneur fit l’annonce à Marie (phylactère « AVE MARIA »)
. Et elle conçut du Saint-Esprit (figuré par la colombe et les rayonnements tournés vers Marie)
. Phylactère : « Ecce ancilla domini » Voici la servante du Seigneur (Marie à genoux répondant positivement à l’Annonciation – « qu’il me soit fait selon ta parole »)

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Et on aperçoit plus loin dans le choeur – sur le siège du célébrant - la 3ème partie de l’angélus : « Et Verbum Caro Factum Est » Et le verbe s’est fait chair…et il a habité parmi nous. C’est L’incarnation du Christ, représentée par le prêtre qui proclame l’évangile et célèbre la messe.
(À noter : Les « agenouilloirs » agrémentés de spirales en fer forgé).

La chapelle latérale du croisillon nord comporte un autel dédié à Sainte Radegonde. Il est surmonté de sa statue moderne dessinée par Gérard ANSART (réalisée par le sculpteur C. Legrand S.C.). Dans un style très Art Déco, aux
lignes droites, tout en verticalité, et réhaussée en beauté par les incrustations de mosaïques, que ce soit au niveau de la couronne (mosaïques dorées et bleues) ou de son auréole, et aussi tout au long de sa robe pour souligner lignes
droites et verticalité (à noter aussi sa chevelure, ses mains et sa longue étole…et aussi son nom au bas de la statue, dans une écriture très géométrique.)
L’autel est en forme de sarcophage mérovingien, en grès rouge gris. Il est sert  de motifs en mosaïque.
Il porte, en latin, l’inscription suivante : « Radegundis : Sancta Dei : Regina : Francorum », c’est-à-dire : Radegonde, Epouse de Dieu, Reine des Francs.

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Voici en quelques mots l’histoire de Sainte Radegonde :
Radegonde, née en 520 en Germanie, de famille royale, est ramenée dans le Royaume Franc en 531 – avec son jeune frère – comme « prise de guerre » par Clotaire 1er (fils de Clovis) qui avait envahi la Thuringe (pays « barbare »).
Clotaire 1er confia Radegonde à la Villa Royale d’Athies pour que lui soit donnée une éducation digne de son sang royal. Quand Radegonde eut 17 ans, Clotaire 1er exigea qu’elle devienne son épouse…contre le gré
de celle-ci qui, dans un 1er temps, s’enfuit d’Athies avant d’être rattrapée et ramenée auprès
du Roi des Francs.
En fait, Radegonde voulait consacrer sa vie à Dieu. Quelques années après que – par le mariage – elle soit devenue Reine des Francs, Clotaire 1er fit assassiner le frère de Radegonde, craignant que celui-ci se rebelle contre la royauté.
Révoltée par cet acte indigne, Radegonde s’en va trouver l’évêque Saint-Médard à Soissons, l’implorant de la consacrer à Dieu en lui imposant les mains…ce qu’il finit par accepter. Ainsi Radegonde se trouvait séparée à tout jamais de son époux royal, mis devant le fait accompli et qui, dans la mentalité de l’époque devait accepter cette situation.
Après avoir quitté la cour royale, Radegonde a très rapidement fondé un monastère à Poitiers et en devint l’Abbesse. Elle mourut le 13 août de l’année 587, à l’âge de 67 ans, après être restée près de 35 ans sans sortir de son monastère.
De son histoire découle l’inscription « Epouse de Dieu et Reine des Francs ».
Les églises d’Athies et de Driencourt lui sont également dédiées, de même que l’église de Poitiers où se trouve son tombeau.
Au milieu du retable en forme de « pignon de toit », une cavité de forme carrée avec une petite porte en fer forgé était destinée à abriter les reliques de Sainte Radegonde.

Un autre reliquaire, très voyant et…mobile, a trouvé place sur l’autel – on ne sait pas quand – avec, semble-t-il, une relique de Sainte Radegonde.

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Juste sous cette cavité figure un Chrisme…monogramme du Christ – sa marque en quelque sorte ou signature abrégée - avec les deux premières lettres de ce mot en grec : Le Xi (X) et le Ro (P)
Les candélabres à 3 branches, en fer forgé, comportent « en soubassement » pourrait-on dire, des coupelles représentant des couronnes royales.
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L’architecte Pierre ANSART et Gérard ANSART, son jeune fils décorateur, préposés à l’ameublement de l’église
reconstruite ont rappelé dans la ferronnerie, la boiserie, les vitraux, les mosaïques…l’époque franque se rapportant à la vie de Sainte Radegonde.
A l’entrée du chœur : on voit deux ambons en fer forgé dont on peut noter la fonctionnalité au niveau du porte-livre « mobile ». (Élément significatif des aspects fonctionnels de l’Art Déco).
Avec l’Art Déco, il y a, tout en étant dans la modernité, une sorte de retour aux sources. Dans les églises de la Reconstruction, « les références aux pratiques des premières communautés chrétiennes sont perceptibles par l’importance donnée ( dans certaines églises) aux chapelles baptismales et par la du mobilier disparu des églises depuis longtemps comme les ambons, moins imposants que la chaire à prêcher, mais aussi moins coûteux à fabriquer ».
« L’ambon est donc : une tribune placée à l’entrée du choeur (des églises chrétiennes) pour la lecture de l’évangile et de l’épître ».
Sur ceux-ci figurent les symboles des 4 évangélistes :
. Le lion pour Saint-Marc,
. Le taureau pour Saint-Luc,
. L’aigle pour Saint-Jean,
. Et L’homme pour Saint-Matthieu.
Encadrés de fer forgé, leurs portraits sont constitués de mosaïques incrustées.

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Les fauteuils du célébrant et des enfants de choeur, en bois, figurent les sièges de l’époque mérovingienne (nous dit l’abbé Studzinski) mais Pierre ANSART, dans les mêmes périodes, dessina les mêmes pour les églises de BERNES et AUCHONVILLERS. « Seul diffère à CARTIGNY le motif du tissu tendu sur le dossier du fauteuil du célébrant, le chrisme a été changé en aigle aux ailes étendues devant l’inscription latine : « Et verbum caro factum est » (Et le verbe s’est fait chair), autrement dit la parole de Dieu est annoncée parl’intermédiaire du clerc » (Commentaire Expo 2014)
Et pourquoi l’aigle ? Peut-être en référence à Saint-Jean qui, comme évangéliste est représenté par un aigle ? (Jean, « celui que Jésus aimait », proche de la mère de Jésus…ou l’Annonciation est peut-être ainsi rapportée dans l’évangile de St-Jean ?

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Le luminaire, dans une présentation « résolument moderne, évoque par certains aspects une rusticité rappelant l’époque franque » de même que le haut du luminaire rappelle la couronne de la Reine des Francs. Les appliques, dans la nef, rappellent les torches franques.

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Quant aux stalles en bois, elles sont d’une réelle simplicité. Elles sont cependant agrémentées, sur leur ligne haute, d’une frise composée de motifs décoratifs tout à la fois sobres et abstraits. Imaginons cet espace sans l’autel « face au peuple » issu du Concile Vatican II, au milieu des années 1960. Il y avait ici, en fer forgé, le banc de communion (comme on dit ici à Cartigny), les stalles occupées par d’autres prêtres présents ou des personnalités du village. Les paroissiens étaient hors du choeur et s’y avançaient seulement pour la communion. « Le maître-autel est en pierre blanche sertie de mosaïque. Ainsi le support central de la table, en retrait, comporte une mosaïque qui figure l’écusson, aux armoiries de la royauté : 3 fleurs de lys d’or sur fond azur avec la devise au-dessus de l’écusson « GESTAE DEI » et en-dessous « PER FRANCAS » : L’histoire de Dieu (écrite) par les Francs ou « L’action de Dieu
passe par les Francs ».

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Sur les deux fûts de la table de l’autel, entre les chapiteaux et la base figurent, en mosaïque, des feuilles de lierre (ou de liseron ?) qui symbolisent : la fidélité, l’attachement.

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Les deux panneaux du tabernacle en pierre blanche sont ornés, à l’intérieur, de mosaïques qui figurent deux paons affrontés, déployant leur ramage vers la porte du tabernacle (un peu comme un presse-livre) en inclinant leurs têtes surmontées d’une aigrette, symbole de l’immortalité ou de la vanité vaincue. A voir aussi sur ce vitrail : 2 colombes affrontées. Thème que l’on retrouve également, semble-t-il, à l’église de Villers-Carbonnel…et à l’église de Moislains, on a deux anges affrontés pareillement autour du tabernacle. Dans le Livret d’expo de 2014, Pascale TOUZET, spécialiste de Pierre et Gérard ANSART, indique que, dans leurs oeuvres, : « le thème des représentations affrontées est récurrent. Les animaux se faisant face, sujet d’origine orientale et fréquemment traité au Moyen Age, apparaissent surtout avec les oiseaux (paons, colombes) dont l’artiste déploie le plumage avec magnificence, notamment sur les retables de part et d’autre du tabernacle ».
Sur la porte du tabernacle en mosaïque est représenté un calice surmonté
d’une hostie.
Au-dessus de la porte du tabernacle est gravé dans la pierre blanche un chrisme auquel font pendant, de chaque côté, la 1ère lettre de l’alphabet grec « Alpha » et la dernière lettre « Oméga » qui signifient « Je suis le commencement et la fin »

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Les deux chandeliers à 3 branches en fer forgé sont fixés sur les deux panneaux latéraux du retable.
Les 4 tiges de la courtine, en retrait de l’autel, sont surmontées d’une couronne royale d’où émerge une crosse abbatiale, l’ensemble en fer forgé. Sur la tenture de gauche figure Radegonde et Saint-Médard avec l’inscription
en latin : « Sponsa Dei » (Epouse de Dieu). La crosse abbatiale rappelle qu’elle a
été abbesse d’un monastère pendant 35 ans. Sur la tenture de droite figurent Clotaire 1er et Radegonde Reine des Francs » avec l’inscription en latin « Regina Francorum ». Et les couronnes présentes ici comme sur les bougeoirs ou les luminaires rappellent cette partie de sa vie.

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Le tout est surmonté d’une crois pattée en mosaïque telle qu’on la représentait à l’époque franque (depuis le IVème siècle).
En haut de la croix, au-dessus de la tête du Christ, on distingue les initiales « INRI » : Ce sont les initiales des mots latins « Iesus Nazaremus Rex Iudacorum », c’est-à-dire « Jésus le Nazaréen Roi des Juifs » que Pilate avait fait
inscrire sur la croix (Jean, ch. XIX, verset 20). Ces initiales figurent souvent sur les crucifix.

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A chaque bras de croix est suspendu un médaillon représentant les lettres grecques Alpha et Omicron en mosaïques.
Pascale Touzet nous dit que « les motifs décoratifs géométriques comme les spirales, les écailles triangulaires, les pendentifs, les motifs centrés ou encerclés, les traits ondulants sont omniprésents dans les représentations des
œuvres, comme des rehauts du décor, et essentiels au traitement décoratif des luminaires, chandeliers, ameublement des églises. Les composantes d’un édifice s’unissent ainsi dans un même style. »
Par ailleurs, « Les extraits de textes donnent du sens aux pièces de mobilier et sont des compléments aux motifs décoratifs. »
A ce propos, même le porte-livre, présent sur l’autel, est de style Art Déco et il est écrit dessus en latin : « Oremus » (Prions).
L’éclairage du choeur à 3 pans aveugles provient des 6 fenêtres en berceau à vitraux symboliques qui représentent respectivement,
Côté Nord :
  • - Le Pélican, qui était au Moyen Age un symbole de piété pour l’Eglise chrétienne. On croyait qu’il perçait sa propre chair et nourrissait ses petits de son sang. Ainsi le Pélican symbolise le sacrifice du Christ qui verse son sang pour le salut du genre humain…S’il se trouve au-dessus de ses oisillons, il est décrit comme « un pélican de piété ». (Wikipédia)
  • - Le paon (vitrail soufflé par une tempête) rappelant peut-être les paons de l’autel ?
  • L’Agneau pascal…On peut voir sur chacun de ces vitraux, outre les spirales toujours présentes, 4 cives disposées, peut-être, comme un rappel de la croix.
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Côté Sud, faisant face aux précédents :
  • - Face au Pélican, on a Le Lion, symbole de puissance ? ou en rappel de Saint-Marc symbolisé par une tête de lion parmi les 4 évangélistes ?
  • L’IXOYS (mot grec) ou ICHTUS en latin (mot qui signifie « Poisson ») et dont les lettres grecques prises séparément correspondant au monogramme du Christ : « Iesous Christos Theou Uios Sôter » c’est-àdire: « Jésus-Christ, fils de Dieu, Sauveur ». Ce mot entouré d’un cercle blanc, semble flotter (marcher ?) sur l’eau représentée par la couleur bleue et les lignes qui peuvent représenter les flots, eau dans laquelle il nous semble distinguer, sous forme stylisée, un ou plusieurs poissons. Le Poisson est le signe de reconnaissance des premiers chrétiens. Il symbolise aussi l’assemblée des chrétiens, c’est-àdire l’Eglise.
  • Les deux colombes affrontées perchées sur le rebord d’un calice (avec, peut-être, en fond une hostie qui émerge par le dessus ?), qui symbolise l’Eucharistie, face à l’Agneau pascal.

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Le Beau-Dieu du portail

La sculpture du Christ surplombant le porche principal de l’église de Cartigny serait une réplique du « Beau-Dieu » au fronton de la cathédral d’Amiens. Les ressemblances sont frappantes.

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Statues anciennes :
L’une est conservée dans la sacristie (elle n’est pas visible à la visite). Il s’agit probablement de Sainte Catherine d’Alexandrie parfois représentée avec une épée, mais surtout en raison de la présence d’une roue brisée sur le côté,
symbole de son supplice. Elle porte sur son socle le texte ALEFEBVRE et à ses pieds, l’empereur à qui elle a tenu tête jusqu’à ce que sa ténacité la conduise au martyre (on peut lire son histoire sur Wikipédia).
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L’autre statue est également conservée en dehors de l’église, il s’agit de Notre Dame des 7 douleurs. Une chapelle lui est consacrée, elle n’a pas été détruite durant la première guerre mondiale.

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CARTIGNY (Somme) – Église Ste Radegonde
Brochure réalisée par l’ARHL – juin 2023
ARHL - Association pour la Recherche sur l’Histoire Locale
Siège social : 20 rue Saint-Eloi – Mairie – 80240 Poeuilly
www.arhlpoeuilly.org
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